De l'influence des rayons gamma sur le comportement des marguerites
Publié le 9 Juin 2009
Film américain de Paul Newman (1973) – 1h40 – avec Joanne Woodward, Nell Potts, Roberta Wallach
Une enfant blonde parle des étoiles, de radiations et des voyages de l’atome. Elle parle avec douceur mais fermeté. Elle est debout sur une estrade face à l’école pour présenter ses expériences
étranges sur les marguerites.
Sa grande sœur est témoin de cela, elle assiste, sidérée, à la transfiguration de celle qui vit cachée derrière ses longs cheveux. Son père aussi, son vrai père, puisque la jeune comédienne Neil
Potts est la fille de celui qui la contemple derrière la caméra, Paul Newman. À cet instant ses paroles chantent.
La mère est le personnage principal de cette histoire, interprétée par la géniale Joanne Woodward, la compagne de Newman de puis les années 1950 jusqu’à la mort de l’acteur réalisateur le 26
septembre 2008.
C’est un portrait déroutant que vise Newman davantage que le psychodrame hystérique post-Actor’s Studio : le personnage tourne tout le temps sur lui-même, et emporté par son élan, finit
systématiquement dans le mur. Beatrice parle, parle jusqu’à plus soif, et son ironie détruit tout.
La petite fille conclut donc ceci : que l’influence des rayons gamma sur le comportement des marguerites peut être merveilleux. L’irradiation peut détruire, atrophier, abimer. Mais son chant
dit tout haut, avec une foi et une conviction qui n’admettent enfin aucune réplique, que l’inverse est possible. Que bientôt la puissance de l’atome fabriquera des marguerites aussi belles et
gigantesques que dans un rêve de Kurosawa. Ses grands yeux bleus l’affirment ; on la croit. Debout, digne, la plante fleurit au milieu des ordures. Dans ces années de guerre froide, hantées
par des images d’apocalypses, rien ne surprend plus que cette apocalypse radieuse.